Stabilité et démesure
Un club se construit en fonction de son histoire. Les décades se succèdent, elle constitue le vecteur essentiel sur lequel les dirigeants guident le club. Dans l’histoire du FC Barcelone il y a une deux dates historiques qui vont changer radicalement l’image et le destin du club. La première intervient durant la guerre avec la nomination par le pouvoir central d’un militaire, le colonel Vendrell à la tête du club blaugrana. La deuxième se produit durant le Mondial argentin avec un dénommé Josep Lluis Núñez entrepreneur en bâtiment et homme de média qui accède à la présidence du club Blaugrana. Cette élection intervient avec le retrait de la compétition de Johan Cruyff et un club en pleine débâcle sur le plan économique.
Durant son histoire le club comme tant d’autres a vu défiler à sa barre des gérants de toute sorte. Tout ce que compte la Catalogne en matière d’homme d’affaires aux contours le plus souvent sulfureux. Cependant, Don Josep Lluis Nuñez est bien déterminé à faire autre chose que ses prédécesseurs. Núñez entre en scène avec un vaste programme de développement du club.
Núñez ne comprend pas grand-chose au football, mais sa prise de pouvoir coïncide avec le déclin de l’Atletico Madrid, l’Athletic Bilbao continue sa politique régionale et Valence étant limité par ses moyens Núñez profite de la situation pour déclarer la guerre ” sportivement ” au Real, alors que Santiago Bernabéu disparaît.
Núñez veut un grand Barça avec les meilleurs joueurs du monde. Visionnaire, il est un des tout premiers dirigeants qui a compris que le football allait changer. Le règne de l’info, du strass et des paillettes va s’installer et en tant qu’homme de médias, il sait qu’il faut créer l’actualité en permanence pour être sur le devant de la scène!
Toute la stratégie va consister à occuper le terrain médiatique en bien ou en mal, peu importe, dans un premier temps il utilise ses réseaux financiers pour remettre le club à flot puis il lance le classico joue la carte du régionalisme à fond, fait une affaire d’État avec les arrivées de joueur comme Krankl, Roberto, Simonsen, Schuster, Maradonna et Lineker ou bien encore quand le hasard lui tombe sur les bras avec l’enlèvement de Quini, le buteur du club, il monte en première ligne et le pays retient son souffle!
Avec cette politique les résultats tardent à venir même si deux Coupes des vainqueurs de Coupes finissent par tomber dans l’escarcelle du club catalan. Par contre en vertu de l’organisation du mondial disputé en Espagne, le Camp Nou se dote d’un troisième anneau et devient la meilleure arène du pays. Il agrandit le palais des sports et commande et inaugure le mini-stade pour la réserve et retape le centre de formation de la Masia. Pour Núñez rien n’est trop beau toute idée qui peut permettre au club Catalan de renvoyer le Madrid au moyen âge est la bienvenue.
Au fil du temps, Núñez continue sur sa lancée, provocant avec Bernd Schuster un de ces psychodrames dont il a le secret. Avec l’étoile allemande idole du Camp Nou, il entame un bras de fer pour une question salariale et Schuster ne joue pas durant huit mois. Résultat, les médias passent leur temps à disserter sur l’affaire. Il accepte même le retour de Cruyff au club en tant qu’entraîneur, mais tout en signifiant à plusieurs reprises à l’ancienne gloire du football européen qui commande. Les victoires des Catalans s’accompagnent toujours de grande tension psychologique dans les couloirs du club c’est un trait caractéristique de la présidence de Núñez !
Les années quatre-vingt-dix voit Núñez contraint de faire de la politique en écartant les tentatives de certains adversaires qui tentent de le décréditer lui et son bilan à travers un groupe baptisé éléphant bleu où l’on retrouve Cruyff et Laporta. Finalement, il se retire en 2000 de la présidence du club.
Avec le temps force est de constater que son bilan sportif est plutôt positif et en termes d’actif et d’image le club a fait un bon gigantesque, enfin au niveau de la gestion, il fut remarquable malgré son programme sachant ne jamais céder facilement aux agents, au joueur et à Cruyff qui souhaitait voir les milliards du club uniquement sur la pelouse. Cependant, cette présidence de vingt-deux années constitue aujourd’hui, la force du club. Celle sur laquelle Laporta et les collaborateurs qui l’entoure on construit les succès du club blaugrana des années deux milles dix. Au milieu d’une cohorte d’intrigants de toute sorte, Josep Lluis Núñez restera pour longtemps, l’homme qui a fait du FC Barcelone un club à dimension planétaire, n’en déplaise à Joan Laporta et ses collaborateurs.