Odyssée : Lamar Hunt III/III
À la conquête du tennis et de l’argent métal
Après la réorganisation du football US professionnel, Lamar Hunt décide de s’attaquer au tennis.
Dave Dixon créateur de la franchise NFL des New Orléans Saints se lance dans le projet de créer le World Championship Tennis – WTC -, un circuit qui réunit des tennismen professionnels. L’affaire capote, car Dixon manque de relais dans le secteur médiatique. Il se tourne vers Lamar Hunt. Les deux hommes se connaissent bien. Quelque année auparavant, Dixon s’était positionné pour racheter les Oakland raiders dans le but de transférer la franchise à La Nouvelle-Orléans. Une idée qui fut refusée par les membres de l’AFL. Après quelques échanges, Dixon et Hunt trouvent un terrain d’entente. Le WTC est né avec pour objectif de concurrencer la fédération internationale de tennis la NTL, une organisation qui regroupe des joueurs professionnels. En deux années, Lamar Hunt absorbe la NTL et signe les joueurs majeurs qui évoluent en professionnels et amateurs. Il rachète la participation de Dixon et fait tandem avec son neveu Al, fils de Margaret. La WTC n’a pas la Coupe Davis et aucun grand chelem à son tableau, mais Hunt compense en signant les meilleurs joueurs et joueuses du monde du tennis. Hunt casse quelques codes, tenue blanche non exigée, le public peut encourager ses favoris bruyamment, mis en place du Tie-Break. La fédération internationale de tennis réagit dans l’urgence et créer le Grand-Prix, embryon de l’ATP. Dès lors, commence une longue bataille entre les deux entités…
Perte des puits
Avec l’arrivée au pouvoir de Mouammar Kadhafi en Libye, les choses changent radicalement pour les compagnies pétrolières étrangères. Après la création d’une société nationale pétrolière, les compagnies américaines passent sous contrôle du régime à hauteur de 51%, mais ne sont guère impactées du fait d’exploiter des gisements peu importants. En retour, la BP et Hunt qui exploitent les gisements clés sont lourdement atteints par cette nationalisation. Bunker refuse toute forme d’accord, mais il n’a pas le choix. Entre-temps l’étau s’est resserré autour des frères Hunt. Ces derniers sont poursuivis par la justice pour avoir espionné leur père au sujet du dernier testament qu’il a rédigé.
Transactions
Bunker est invité avec son père par l’ex-gouverneur du Texas John Connally dans son ranch. Sur place, ils rencontrent le président Nixon qui leur propose mont et merveille et l’immunité totale concernant leurs ennuis avec la justice. En retour, Nixon demande à Bunker de lui fournir la liste des agents du Fatah, mouvement de libération de la Palestine fondé par Yasser Arafat. Les Hunt financent par divers canaux l’organisation palestinienne aux USA. Coincé, Bunker lâche prise. La liste donnée par Hunt permet de déjouer un attentat visant Golda Meir à New York. En retour, Nixon ne fait aucun geste pour les frères Hunt. Pour Bunker c’est bien plus qu’une simple trahison. Deux ans plus tard, Nixon et son équipe sont emportés par l’affaire du Wartegate…
Fin du patriarche
Alors que la fin 1974 touche à sa fin, le “chat sauvage” tire sa référence à l’âge de 85 ans. Hl Hunt laisse à sa deuxième épouse les commandes des pétroles Hunt. L’ensemble de la société est divisé en part égale entre les héritiers. Alors que le testament est dévoilé, les deux clans héritiers ont la surprise de voir apparaître une famille supplémentaire concernée par l’héritage. Durant les années trente, HL Hunt avait épousé en secret une jeune femme en Floride dont il eut plusieurs enfants…
Hérédité
Outre leur fortune due aux fiducies, les frères Hunt ont hérité de leur père, la passion du jeu et le rejet des signes extérieurs de richesse. Point de yachts extravagants de jets luxueux et de propriétés fastueuses aux quatre coins du monde dans la famille. Les frères Hunt portent des vêtements issus du prêt-à-porter, voyagent en classe économique et se déplacent en métro et en taxi lors de leur rendez-vous d’affaires à New York. Un jour alors qu’il se trouve à New York, Bunker enfile deux hot-dogs et un Pepsi et file en métro rejoindre une dizaine de partenaires en affaire. Au menu, l’achat des New York Yankees !
John Paul Getty et Howard Hughes décédé en 1976, Bunker à la tête de sa société pétrolière et propriétaire d’un formidable haras de plus de cinq cents chevaux, dont plusieurs cracks, devient l’entrepreneur le plus riche d’Amérique. La perte des forages libyens a diminué sa puissance de frappe, mais pas son appétit. Au tout début des années soixante-dix, fort de son trésor, il commence à racheter l’argent métal avec son frère Herbert. Le but des frères Hunt est de mettre la main sur le marché de l’argent métal. Lamar ne reste pas sur la touche. Il participe aussi à cette entreprise. Les Hunt arrivent à convaincre des banques américaines et enfin l’Arabie Saoudite allié des États-Unis en toute circonstance à se joindre à eux. C’est un nouveau tour de force que réussit Bunker. Jamais depuis sa création, le constitutif qui prévaut à la marche du capitalisme américain ne s’était retrouvé dans une telle situation. Après l’exécutif order 10100 de Kennedy, voilà que les frères Hunt tentent de remettre en cause les fondations du système basé sur le clanisme et le népotisme. N’ayant aucune confiance dans la protection de bien sur le sol américain, Bunker prévient William et Lamar. Le bulldog affrète trois 707 cargos et expédie tout l’or qu’ils ont accumulé vers la Suisse. La suite résumée dans cet article du Monde
Le sujet qui résume l’affaire est une addition de demi-vérités soigneusement travesties. Simple exemple, il faut remplacer le mot gouvernement par FED, la Reserve Fédérale contrôlée en partie par la Chase Manhattan et JP Morgan qui depuis ont fusionné. Vu les soutiens des frères Hunt, il s’agissait ni plus ni moins que d’une attaque de Bunker envers le cartel qui contrôle la FED. Qualifier l’acte d’illégal des frères Hunt est un bien grand mot.
Les frères Hunt ne furent pas ruinés par cette affaire même si Bunker vit sa fortune passer de 6 milliards à deux cents millions, néanmoins tout comme William, il se foutait de savoir quelle était l’ampleur de son patrimoine. Ce qui le guidait était le fait de réaliser des coups, de jouer avec les nerfs de certaines personnes. Bunker Hunt fut un des rares hommes qui pouvait se vanter d’avoir grandement perturbé le sommeil des sangs bleus de la côte-Est qui tiennent l’Amérique et une moitié du monde dans leurs mains. Privé de toute dynamique, il se retira du monde des affaires.
Bataille perdue
Dans toute cette agitation, Lamar Hunt lâche prise avec la WTC. Malgré de gros investissements et le succès de certains tournois dont celui de Dallas, il n’a pas réussi à faire de son circuit une entreprise capable de mettre à mal le monopole qu’exerce l’ATP sur le monde du tennis professionnel…
Retour aux affaires
Après avoir délaissé Kansas City du fait de ses nombreux investissements dans le monde du sport professionnel, Lamar revient aux commandes des Chiefs et cherche désespérément un successeur à Hank Sramm. L’entrepreneur texan signe Marty Schottenheimer pour occuper le poste de coach. Ce dernier possède une bonne expérience dans le domaine du coaching. Hunt et Schottenheimer travaillent à reconstruire une équipe pourvue de faiblesse à tous les niveaux. La défense est transformée, les équipes spéciales sont remaniées, reste l’attaque des rouges. En raison des ennuis de santé et contractuelle de Joe Montana avec San Francisco, Hunt et Schottenheimer se mettent en tête d’attirer le meilleur quarterback de l’histoire du football américain. Pas très bien remis d’une vilaine blessure, Montana joue peu et Steve Young drive les 49ers sans trop de problèmes. Pour les dirigeants de San Francisco, la cause est entendue, ainsi Montana se retrouve sur le marché. Hunt et Schottenheimer ne perdent pas de temps à convaincre le Roi Montana. Joe Montana intègre les Chiefs avec l’assurance d’un jeu offensif adapté à sa personne. Peu après, Schottenheimer recrute Marcus Allen, coureur vedette des Raiders et de la NFL, certes vieillissant, mais qui a encore du jus. Lamar Hunt tient sa dream team…
Si près du but
Les Chiefs surmotivés par ses nouvelles arrivées remportent leur division et file en finale de l’AFC. Les rouges sont finalement battus par les Buffalo Bills qui file vers leur quatrième participation d’affilée au Super Bowl, mais le coup est passé près de voir Montana et ses coéquipiers disputés le titre suprême. La saison suivante, les rouges sont moins performants, les stars sont fatiguées. Les Chiefs disputent les play-offs, mais s’inclinent une fois de plus. Malgré le retrait de Montana, les rouges sous le commandement de Schottenheimer filent à deux autres reprises en finale de l’AFC sans pouvoir triompher. Hunt fut déçu, si près du but, mais c’est le jeu. Fatigué, il décide de préparer sa succession. Il désigne son fils Clark issu de son deuxième mariage pour prendre les rênes de la franchise du Missouri.
Entre deux rives
Si Lamar Hunt fut profondément marqué par l’héritage de son père, il ne fut jamais en situation de devoir se dissocier de la réputation de son père.
De nos jours, il est de bon ton pour des réseaux financés par l’establishment à travers certaines universités, médias et officines que l’on trouve sur Internet de mettre sur le dos d’HL Hunt, tous les crimes qui ont ensanglanté les États-Unis durant les années soixante. C’est confortable, et on peut faire carrière. Certes, HL Hunt était un entrepreneur un brin canaille, droitard, néanmoins, l’homme n’était pas dénué d’âme. Aucun passif sérieux à son encontre, pas même la tragédie de New London ou une de ses sociétés fut impliquer dans l’accident, mais Hunt et ses employés n’était en rien responsable du drame. Marqué par l’ampleur de la catastrophe, HL Hunt assumera tous les frais d’obsèques et d’hospitalisation d’une population meurtrie à jamais. Aucune affaire douteuse avec les ennemis des États-Unis, d’immixtion dans le domaine de la recherche conduisant au pire. Pas d’acte de hautes corruptions, aucun acte lié à la violence sociale, pas de Teapot Dome, ni de massacre de Ludlow à son encontre, là où ses ennemis cumulent en masse les pires méfaits commis au XIX et XX siècle. Ça continue…
HL Hunt était un réfractaire à l’ordre dessiné et établi par les puissances d’argent du nord. Toutefois, à l’orée des années cinquante, et ce dans un souci d’apaisement, le libertarien disparu pour laisser place à un libéral conservateur, angoissé et paranoïaque…
Documentaire télé réalisée en 1970 sur HL Hunt
Presbytérien puis baptiste sous l’emprise de sa deuxième épouse, HL Hunt était un homme peu structuré en théologie politique. Il réfutait être un anarchiste, ce qu’il avait été durant la première partie de son existence le conduisant à une ascension vertigineuse, parallèlement il tançait ses interlocuteurs qui le présentait comme un libéral conservateur. Hunt avait tendance à tout confondre. Ses écrits et ses interviews se passent de commentaires. Durant toute son existence, Lamar Hunt fut partagé sur son action. Une attitude dictée par l’héritage du père. Rebelle, frondeur, prêt à remettre en jeu ce qui avait été gagné la veille et la volonté d’entreprendre à grande échelle des projets visant à bousculer l’ordre établi par des rentiers solidement ancrés à leur fauteuil. En retour, en fonction de ses réalisations et de ses engagements, il fut contraint d’adhérer au pouvoir dessiné par les élites du nord-est du pays, des gens qui pensent gouverner l’Amérique du Nord, ad vitam aeternam…
Épilogue
Vu les tempêtes qui s’annoncent à l’avenir sur le plan social, politique et économique, de par son odyssée, Lamar Hunt a ouvert des perspectives. Le monde du sport professionnel après s’être enfermé dans un entertainment sous contrôle va peu à peu évoluer pour muter vers autre chose, c’est une certitude. Lamar Hunt a dessiné sans l’avoir pensée, le futur du sport professionnel…
Présent
Lamar Hunt aimait suivre les rencontres de son équipe en tribune, délaissant le confort traditionnel des loges. Après son sa mort survint en 2006, sa place habituelle a été remplacée par un siège de couleur jaune. Le patron reste présent…
L’argent annule la créativité et stimule la conformité